Révocation de dirigeant: quelle preuve ?
Révocation de dirigeant: quelle preuve ? Le Cabinet de Me Jonathan Pouget, avocat en droit des affaires, vous éclaire sur une récente décision clé de la chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. com., 12 févr. 2025, n° 23-18.415), qui illustre la portée mais aussi les limites du nouveau « droit à la preuve ». Cette décision apporte des précisions fondamentales pour les entreprises tentées de produire des documents sensibles ou obtenus dans des conditions discutables pour prouver une faute d’un ancien dirigeant.
I. Le contexte : preuve déloyale dans le cadre d’une révocation
Dans cette affaire, une société avait mandaté un huissier de justice le jour même de la révocation de sa gérante afin de collecter des éléments sur son ordinateur professionnel, soupçonnant une concurrence déloyale. Problème : l’huissier en question était… le frère du nouveau dirigeant. Cette situation posait un double problème de déloyauté dans la collecte de preuve et d’absence d’indépendance du commissaire de justice, ce qui a conduit les juges à rejeter l’admissibilité du constat.
II. Le nouveau cadre : preuve illicite ≠ preuve irrecevable
Depuis l’arrêt d’Assemblée plénière du 22 décembre 2023 (n° 20-20.648), une preuve obtenue de manière déloyale ou illicite n’est plus automatiquement écartée. Elle peut être admise si elle est indispensable à l’exercice du droit à un procès équitable (art. 6 §1 CEDH) et si aucun autre moyen loyal n’est envisageable.
Ce nouveau principe a souvent été utilisé pour :
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Prouver une faute grave d’un salarié malgré une atteinte à sa vie privée (Soc. 25 sept. 2024, n° 23-13.992) ;
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Déroger au secret médical (Civ. 2e, 30 janv. 2025, n° 22-15.702) ;
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Écarter le secret des affaires (Com. 5 févr. 2025, n° 23-10.953) ;
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Produire des documents confidentiels comme des transactions.
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III. Un revirement à double tranchant : les limites du droit à la preuve
Dans l’affaire du 12 février 2025, la société évincée voulait s’appuyer sur les preuves recueillies par l’huissier « familial ». Or, selon la Cour :
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Le lien familial entre le nouveau gérant et le commissaire de justice violait son devoir d’indépendance (Ord. 2016-728, art. 8) ;
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La preuve, bien qu’illicite, n’était pas indispensable : aucune situation d’urgence ne justifiait cette démarche, qui aurait pu être réalisée loyalement via une procédure de type article 145 du Code de procédure civile.
Résultat : la preuve est écartée. La Cour rappelle qu’une preuve déloyale n’est admissible que si :
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Elle est strictement nécessaire ;
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Aucune preuve équivalente ne peut être obtenue par des moyens loyaux ;
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La déloyauté n’est pas le fruit d’une volonté manifeste de contourner la procédure.
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Ce qu’il faut retenir – Révocation de dirigeant: quelle preuve ?
La jurisprudence actuelle sur la preuve évolue vers plus de souplesse, mais ne justifie pas toutes les méthodes. Toute tentative de contournement des procédures classiques, même en invoquant un besoin probatoire pressant, peut se retourner contre l’entreprise. Il convient donc de manier cette nouvelle liberté avec prudence.
Le Cabinet de Me Jonathan Pouget vous accompagne dans la collecte et la production de preuves en matière de droit des sociétés, tout en assurant leur recevabilité devant les juridictions. Vous évitez ainsi de vous exposer à un rejet pour déloyauté ou violation d’un secret protégé.

